Charles Fréchette de Chambly condamné pour haute trahison en 1798

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Engagé malgré lui et par naïveté, dans une affaire rocambolesque qui tournera au cauchemar, Charles “Frichet”, paroissien de Chambly, habitant à St-Luc, a 37 ans quand il se voit condamné à l’emprisonnement à vie. On est en hiver 1798. Il avait hébergé un Américain du nom de David McLane qui se faisait passer pour une sorte de marchand de bois. Ce dernier, raconte-t-il, voulait rassembler les Canadiens pour provoquer un soulèvement général et libérer la colonie de l’emprise britannique.

Propos de taverne ou bravade d’échevelé, on ne sait pas. Mais le projet fut éventé. McLane, arrêté, est conduit à Québec. Les autorités britanniques n’entendent pas à rire. D’abord le cachot. Puis la sentence, vite rendue. À mort !… mais pas n’importe comment. Une exécution visible et exemplaire, place publique, pour qu’on se souvienne. Une séance d’horreur qui fera oublier des tentatives semblables.  “Devant douze jurés anglais, en vingt minutes, David McLane a été condamné à être pendu et éviscéré vivant, pour avoir ensuite la tête coupée et les membres séparés du corps. Vite et au plus coupant !!! Le 21 juillet 1798 à Québec. Les spectateurs du supplice, dont l’auteur Philippe Aubert de Gaspé, en sont restés sidérés.

Charles Fréchette (1761- ), quant à lui, fut trouvé “coupable le 27 mars de recèlement de haute trahison, ayant eu connaissance des desseins de David McLane contre cette province, et les ayant cachés. Par un jugement qui fut prononcé le 31 mars 1798, tous ses biens meubles sont déclarés être confisqués au Roi, ensemble avec les profits de tous ses immeubles. Il est condamné à un emprisonnement à vie. ” (Notes de René Boileau, dans Zouaviana).

Pour ajouter au déshonneur et s’assurer que rien ne soit oublié dans la saisie, on obligea les notables de Chambly, les seigneurs et leurs gérants d’affaires à déclarer les biens du condamné. “Ceux qui ont été sommés pour servir comme jurés à l’enquête des biens de Charles Frichette (sic) sont : Jean-Baptiste-Melchior Hertel de Rouville, Henry Hardi, René Boileau, James McCumming, Joseph Ainse, John Cameron, Jacques-Clément Herse, William Yule, Louis Marchand, James Wood, François Rolland, Samuel Jacobs, Joseph Hébert, John Lane et Edme Henry“. (Notes de René Boileau, dans Zouaviana). Tous gens de Chambly, de St-Luc et de St-Jean, fidèles exécutants d’allégeance coloniale. Charles Fréchette était père de trois garçons et de trois filles, le plus vieux âgé de 13 ans.

Par bonheur, et sans qu’il l’ait sollicité, Charles Fréchette obtiendra une remise de peine, sera libéré de prison et remis en possession de ses biens. (DBC, vol 7, page 618, par S. R. Mealing. DBC, vol 4, pages 542-543, par Claude Galarneau)

Charles Fréchette (Frichet) (1761- ), fils d’Étienne et de Marie-Anne Dupéré, avait épousé (1) Marie Boucher (1761-1816) à Chambly le 11 octobre 1784. Elle est la fille de Michel Boucher et de Marie-Louise Bourassa. Étaient présents et témoins au mariage: Jean-Baptiste Fréchette son oncle, Marie-Madeleine Loignon, sa tante, Ignace Fréchette, un cousin et Madeleine Fréchette, une cousine. Laubergiste et laboureur Charles Frichet, devenu veuf, épousera (2) Charlotte Gosselin, la veuve de feu François Ménard, à St-Luc le 17 février 1817. Les témoins de Charles Fréchette sont alors Louis Fréchette son frère, Louis, Charles et Jean-Baptiste Fréchette, ses fils, et Antoine Fréchette, un ami. Nous n’avons pas trouvé le lieu ni la date de sépulture de Charles Fréchette.

Illustration: L’un des récits historiques concernant l’affaire McLane.