Un rite d’hommage disparu : La plantation du mai !

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – À l’époque de notre régime seigneurial, les censitaires manifestaient leur respect au seigneur du lieu lors d’une cérémonie d’origine très ancienne. Ils érigeaient devant sa demeure un arbre ébranché jusqu’aux touffes du sommet.

Le sapin élevé, les hommes tiraient des salves de fusil dans le tronc ou dans la cime, question d’ouvrir les festivités. Manière de saluer respectueusement celui qui représentait quelque peu le Roi. Question aussi de saluer le retour du printemps et le moment des semailles.

On festoyait le 1er mai, on se régalait de sirop d’érable, de crêpes généreuses, voire de tourtières ou de jambon. On avinait le tout de rhum des îles, là où le maître des lieux se voulait généreux. Mais quand le seigneur résidait en ville, s’il devenait député, ou quand la seigneurie devenait propriété anglophone, la vénération risquait de devenir raillerie.

Les tumultes de 1837, alors que les seigneurs, comme les curés, se montraient réfractaires, et l’abolition du régime seigneurial en 1854 auraient mis fin à ces révérences aristocratiques, devenues désuètes…

Pas totalement toutefois. En 1874, on plantait encore le mai… mais sur la glace (!) : “Avant hier, dans l’après-mdi on se réunissait chez le major Édouard Paul du Chenal du Moine devant la résidence duquel un mai devait être planté. Après un souper fut servi… des toasts proposés et bus avec entrain… Vers minuit, les cinquante invités se retirèrent. À Louiseville (appelé alors Rivière-du-Loup), on se prépare à planter le mai sur la glace. À Ste-Anne-de-la-Pérade, la glace est assez bonne, nous venons de planter un mai que le Dr Ross est venu inaugurer. Grand nombre de coups de fusil ont été tirés. … De pareilles fêtes ont eu lieu à Nicolet, à Pointe-du-Lac et à Yamachiche. À Trois-Rivières, le vendredi, le mai traditionnel a été planté sur la glace en plusieurs endroits voisins de la cité. Comme dans le bon vieux temps, cet évènement a été marqué par de joyeuses réunions d’amis. À la Banlieue, M. O. Duval et ses amis ont planté le mai au grand chenal et sur une glace aussi solide qu’au mois de janvier.

Nous ne possédons pas d’information à savoir si la plantation du mai aurait été célébrée devant nos seigneurs francophones et anglophones, ni sur la glace du bassin.

Référence: La Minerve, lundi 4 mai 1874, page 2 et mercredi, 6 mai 1874, page 2.

Photographies : Archives de la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly, Fonds P065. La Plantation du mai au fort de Chambly vers 1990. La Compagnie de milice de Chambly avait reconstitué annuellement cette cérémonie ancestrale au fort de Chambly.