Pain aux patates, pain aux pommes et pain de fesse !

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Lors du recensement de Chambly en 1871, l’énumérateur, Joseph-Octave Dion demandait aux boulangers du village de quelle matière ils composaient leurs miches de pain.

Napoléon Gauthier, qui tient une boutique de boulangerie avec deux employés déclare: “J’utilise annuellement 596 quarts de fleur. Je fabrique 11 920 pains pour une valeur de $2 384.00. J’emploie aussi du houblon et 130 minots de patates.”

Le boulanger de Chambly-Canton Noël Breux, qui “dispose d’un seul employé, utilise aussi du houblon, des patates et de la fleur. Il vend dans une année moyenne 24 000 pains, pour une recette de $4 000.00”.

Doit-on voir dans cet usage de la patate une influence irlandaise ? Le lecteur trouvera inclus une recette de pain aux pommes. La pomme commune remplacerait la pomme de terre. Ce qui donnerait, “dans son jus”, une miche “excellente, pleine d’yeux, très légère et d’un goût très agréable”.

Bon ! On peut s’étonner aujourd’hui. S’il est vrai qu’on trouve des “pains aux raisins”, des pains au fromage, au jambon et d’autres variétés, le consommateur bouderait probablement le pain aux patates aromatisé de houblon.

Les intéressés trouveront une recette de ce pain consistant dans le journal de Saint-Jean, Le Canada-Français, édition du 24 février 1944, en page 19. Comprenez qu’on se trouve en période de guerre et de rationnement. On propose ainsi aux ménagères ce substitut nourrissant.

Quant à notre “pain de fesse” bien canadien, par son nom et sa forme et pour sa conservation, souvenons-nous de sa saveur paysanne, de son poids bien mesuré. Il suffisait de quelques unités bien corsées pour remplir la huche pour la semaine. En attendant la prochaine “run” du boulanger ambulant.

Recettes: Le Franco-Canadien, vendredi 21 décembre 1860, page 3 et Le Canada-Français, 24 février 1944, p. 19.