La piastre, le crédit, l’endettement. Hier et aujourd’hui

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Les économistes évaluent que le citoyen moyen aujourd’hui qui reçoit 100 dollars, en doit 170. Ce montant inclut toute dette, hypothécaire, de consommation, de carte de crédit, d’emprunt personnel, etc.

Sous le Régime français, le taux unique et légal d’emprunt de la monnaie était fixé par l’État et minutieusement surveillé par l’Église, qui condamnait l’usure. Ce taux fixe était de 5% c’est-à-dire « au denier vingt », selon la formulation antique. Quels que soient le montant ou la forme de paiement contractés.

Sous le Régime anglais, Ce taux a été porté à 6 %. Il a été maintenu à 6 % jusqu’à ce que le gouvernement de l’Union des deux Canada adopte la loi dite « sur l’usure » le 24 mars 1853. Il supprima la limite du 6 %. Pourquoi ? Parce que les taux du marché américain étaient variables, donc plus profitables de prêter à des Américains qu’à des Canadiens. Fuite des capitaux.

Aussi parce que des pressions étaient exercées par les capitalistes privés et par les banques. Un de ces argentiers écrivait : « Je peux acheter un cheval 100 $ et le revendre 125 $, avec un bénéfice de 25 %, mais quand je prête 100 $ à 6 %, je n’en retiens que 6 dollars ». Le taux nominal d’un prêt aux États-Unis en 1850 était de 10 %.

Donc la loi fut graduellement modifiée, laissant le créancier et le débiteur négocier leur taux. Il s’en est suivi une montée des taux d’intérêts à 8 %, 10 % et même 12%. « Solyme Larocque, cultivateur de Saint-Mathias doit au docteur Lafontaine de Chambly 100 piastres en argent prêté, payables en un an, au taux de 12 % ». (Notaire Paul-Solyme Bertrand, 18 novembre 1861). En 1869, les membres de la famille Johnson consentaient des prêts au taux de 9 %. L’hôtelier Charles Chaurette, de Chambly, prête 500 $ pour un an, à 10 %. (Notaire Paul Bertrand, 10 juillet 1874).

Vous imaginez bien les nombreuses faillites des habitants devenus incapable d’honorer leurs dettes.

Source : « Quatre trent` sous dans `a piasse », Paul-Henri Hudon, étude historique parue en 2011, 165 pages. Disponible aux archives de la Société d’histoire.

Photographie en haut de page : Dollar canadien unilingue de 1935.

Ci-haut Symbole du dollar : les colonnes d’Hercule symbolisent le trait vertical sur le $, ou le « Spanish Pillar Dollar »