La “grippe espagnole” arrive à St-Jean en septembre 1918

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Le journal “Le Canada-Français”, tente de rassurer la population qui panique à l’arrivée de cette influenza. Les militaires démobilisés l’auraient apportée d’Europe. “La population s’est alarmée. Elle n’est qu’une grippe ordinaire”, rassure-t-on. “Mais si le malaise persiste, appelez le médecin, qui aura vite mis dehors tous les “espagnols” qui n’ont que faire ici. Faites usage de désinfectants dans les latrines et les crachoirs et il faut en user également en ablutions buccales et nasales”. (Le Canada-Français, 27 septembre 1918, p. 4).

Cependant, hier comme aujourd’hui, on devra admettre qu’il faut adopter de sérieuses habitudes de précaution: “Le malade doit s’isoler dans une chambre bien ensoleillée, aérée et chauffée. Éviter de tousser ou d’éternuer sans se couvrir la bouche… éviter de parler trop près et face aux gens… Sous aucun prétexte, ne pas embrasser, ni se laisser embrasser par quelqu’un… La durée de l’incubation étant de deux jours, on se servira de gargarismes et de rince-bouche antiseptiques… L’eau de javel qu’on trouve dans toutes les maisons est un de ces bons antiseptiques. (Le Canada-Français, 4 octobre 1918, p. 5). “Une bonne purge…” ,  suggère-t-on en octobre 1918, comme aurait fait le médecin de Molière.

En novembre un remède est mis en vente: “Sniffer des capsules de Crésobène. Ces odeurs balsamiques sont germicides et rendent la respiration facile”.

Les premières mesures publiques à prendre sont “la fermeture des théâtres…” Évidemment, les ligues de moralité avaient rapidement ciblé le mal. “L’obligation d’assister à la messe a été levée, mais chacun sera libre d’y assister… La tombola en faveur de notre hôpital est remis indéfiniment…” (Le Canada-Français, 11 octobre 1918, p. 5). En somme, rien de plus aujourd’hui avec notre “Covid-19”, qu’il y avait cent ans avec “l’espagnole”. Distanciation, confinement, hygiène élémentaire.

Tous faits calculés, cette épidémie aura été passablement mortelle: “Le Québec est évidemment touché par cette pandémie qui apparaît en septembre 1918 chez des soldats de Saint-Jean-sur-Richelieu. Les mesures préventives les plus modernes pour l’époque sont pourtant mises en œuvre : isolement des malades, port du masque, fermeture des lieux publics, interdiction de rassemblement, érection d’hôpitaux temporaire, distribution de circulaires à la population indiquant certaines mesures préventives, réglementation des heures d’ouverture des commerces… On estime que 530 000 personnes sont atteintes de la grippe espagnole dans la province et qu’elle cause 14 000 victimes”. (Denis Goulet, dans Québec Science).

Illustration du haut: Le port du masque en 1918. Le Canada-Français 24 octobre, 28 novembre 1918.