Homme et femme mariés doivent vivre sous le même toit

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Vivre sous le même toit. Telle était la règle. Fortement appuyée par le clergé et largement acceptée par la population. Le divorce n’était pas autorisé. Dura lex, sed lex.

L’épouse pouvait obtenir une séparation de biens, lorsque le mari, irresponsable, dilapidait le patrimoine familial. Mais quitter le foyer était mal vu. Nous connaissons quelques cas où la séparation de corps et d’habitation fut accordée par sentence d’un tribunal. Il en fut ainsi pour le ménage de Louis Papineau et Élisabeth Harbec (René Boileau, 7 juin 1835) de Chambly et pour celui de Desanges Brunet et Jean-Baptiste Laguë de Saint-Mathias. (Paul Bertrand, 31 mars 1852)

Cependant, il est arrivé des situations où la convivialité devenait insupportable. Des exceptions peut-être parmi un certain nombre de mariages mal assortis. Nous faisons état ici de deux circonstances ou la mariée trouve refuge auprès d’un parent. Lisons:

Louise Nadeau, fille de Jean-Baptiste Nadeau, cultivateur de Sainte-Marie et Marie Bellerose (Ménard), reçoivent la visite d’un notaire, muni d’un protêt de Jean-Baptiste Mercille (Marcil), époux de Louise Nadeau. Le marié exige “que Jean-Baptiste Nadeau ait à livrer immédiatement Marie-Louise Nadeau, sa fille, au dit Mercille, son époux, ou de la reconduire aujourd’hui chez Alexis Trudeau, maître menuisier de Chambly, où il fait son élection de domicile. Nadeau la retient injustement par des menaces et des mauvais conseils. Et, au mépris de son devoir, il lui fait abandonner le lit de son époux. Réponse de Marie Bellerose: “Elle refuse d’ouvrir la porte au notaire…” (René Boileau, 29 décembre 1813). Pouvons-nous imaginer l’inquiétude du père qui doit décider de retourner sa fille à son foyer, ou à la garder dans le giron familial. Douloureux débat entre l’affection et le devoir ?  Jean-Baptiste Marcil avait épousé Marie-Louise Nadeau à Marieville le 3 novembre 1812. Il a fallu moins d’un an pour qu’un désaccord s’installe. Or, Jean-Baptiste Mercille décède et Marie-Louise Nadeau épousera François Guillet à Marieville le 5 février 1816.

Jean-Marie Courtemanche, cultivateur de Chambly, fait livrer un protêt à Michel Loupretretiré dans sa maison, pour avoir donné asile et retenir encore chez lui la nommée Élisabeth Robert, épouse du requérantElle a laissé la maison de son mari, abandonné le soin de ses enfants et de son ménage au grand détriment du requérant et au grand scandale du public. (Joseph Demers, 4 juillet 1832). Jean-Marie Courtemanche avait épousé Élisabeth Robert à Chambly le 5 septembre 1808. Elle est la fille de François Robert et de Catherine Pepin. Michel Loupret avait convolé en justes noces avec Marguerite Robert, fille de François et de Catherine Pepin.

La mariée s’est donc réfugiée chez sa soeur cadette.  Élisabeth Robert avait donné naissance à quinze (15) enfants entre 1809 et 1830, dont deux couples de jumelles. Onze (11) de ces enfants sont décédés en très bas âge. De plus en ce juillet 1832 sévit l’épidémie de choléra. Jean-Marie Courtemanche décèdera le 6 juillet 1832, Élisabeth, trépassera le 15 juillet 1832, âgée de 45 ans.

Illustration. L’Opinion Publique 22 janvier 1880.