“De la famine, de la peste, de la guerre, libérez-nous, Seigneur”.

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Seuls les plus de soixante ans se souviendront de ce verset de la longue Litanie des Saints chantée dans les églises. Depuis l’an 950, dans les périodes troublées par les grands malheurs, les croyants invoquaient les puissances du Ciel pour apaiser les souffrances.

“A fame, peste et bello, libera nos, Domine” et Dieu sait si les calamités étaient nombreuses. Souvent elles se succédaient à répétition, l’une entrainant l’autre. La guerre conduisait à la famine. La faim favorisait les pandémies. Et vice versa. La peste surtout, par sa morbidité rapide et incontrôlée, était particulièrement crainte. Appelé “le mal des Ardents”, ce fléau rayait de la carte des villages entiers. Lafontaine écrivait: “La peste, ce mal qui répand la terreur… Les tourterelles se fuyaient. Plus d’amour, partant plus de joie… on en mourrait pas tous, mais tous en étaient frappés”.

 

«  Paris en 1418, on se mouroit d’épidémie très merveilleusement dedans la ville car comme il fut trouvé par les curés des paroisses, il y mourut cette année oultre le nombre de quatre-vingts mille personnes. » La peste de Naples (c200 000 morts) en 1646 a été bien documentée (illustration). Celle de Marseille en 1720, la dernière des grandes pestes, laissait les autorités privés de moyens. Quoique le roi eut mis en quarantaine toute la région de Provence, et imposé le blocus des ports, la réaction des gens est de fuir. Des familles abandonnent le pestiféré à son sort en lui laissant un cruchon d’eau. D’autres réoccupent ces lieux vidés de leurs habitants. Des pillages s’en suivent. La nourriture manque. On se méfie de l’eau des fontaines. Des troupes d’errants se forment mendiant leur pitance. Les moissons et les récoltes sont négligées.

D’autres se barricadent chez eux. Les soignants, car il y en avait (les communautés religieuses, des veuves guéries s’occupaient des orphelins, des volontaires ensevelissaient les morts), les soignants donc, au risque de leur vie tentaient de se prémunir par des moyens élémentaires. Ainsi le masque, en forme de bec de corbeau, qui formait “le costume du médecin de peste” (Wikipedia), était fourni d’épices, d’ail, de camphre, de vinaigre ou de toute herbe sensée éliminer les “miasmes” de l’air. Car l’on croyait que l’épidémie provenait de la putréfaction de l’air.

(Même à Montréal, lors de l’épidémie de choléra de 1832, on faisait tonner les canons pour purifier les propriétés morbides de l’air. On attendait l’arrivée de l’air froid pour atténuer l’épidémie). On recommandait d’éviter les marais, les ruisseaux insalubres. Et bien sûr, on invoquait tous les saints pour obtenir la protection du Ciel.