Un vol de cadavres, 1875, et un monument funéraire, 1940. Chambly

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Au début du mois de janvier 1875, des étudiants en médecine de Montréal, s’emparent de la dépouille d’une personne récemment décédée à Chambly. La pratique des vols de cadavres, qui était trop fréquente à l’époque, avait pour but de fournir aux laboratoires de médecine des corps humains pour l’anatomie, la dissection et l’exérèse des organes vitaux. Tout ça pour une meilleure connaissance, par les futurs médecins, du squelette et des organes humains. En effet, les écoles de médecine manquaient de sujets d’observation. Seuls les victimes de pendaison donnaient leurs “corps à la science”. Mais la fréquence était insuffisante.

Le Journal Le National, dans son édition du 23 janvier 1875, écrivait: “On doit se rappeler qu’il y a deux jours, nous parlions d’un vol de cadavres qui avait été commis à Chambly-Bassin. Le détective Cinq-Mars, qui avait promis de se charger de l’affaire, n’a pas perdu son temps. Assisté de M. Dion, de Chambly, il est parvenu à retrouver le cadavre en la possession de certains étudiants en médecine de cette ville (Montréal), qui ne se sont pas fait prier pour remettre leur proie à l’habile agent de police” (Le National, 23 janvier 1875, no 214). Les carabins avaient-ils un complice chamblyen, lui-même disciple d’Esculape ?

Qui donc décède à Chambly en janvier 1875 ? Deux enfants: un nourrisson âgé d’un mois, et un bébé naissant sont portés en terre les 5 et 16 janvier. Mais est inhumé au cimetière, le 19 janvier, le corps de Joseph Beauvais, jeune garçon, âgé de près de 17 ans, fils de Trefflé Beauvais, journalier, et de Lucie Daignault. Nous pouvons penser que c’est ce jeune trépassé qui fut l’objet du larcin des étudiants. La sépulture suivante est celle de Pierre Desorcy, le 23 janvier.

 

Par ailleurs, l’illustration (la photo date de 1943) nous montre dans le cimetière de Chambly un lourd monument en pierre qui pourrait être soit un mausolée privé, soit le charnier hivernal pour les paroissiens défunts. Il est situé juste derrière la stèle funéraire de Charles-Michel de Salaberry. Laquelle stèle, commandée par le curé Mignault, appartient à la fabrique, tout comme l’emplacement et la croix de pierre située aujourd’hui derrière ce caveau funéraire.  De tels cénotaphes servaient de dépôt ossuaire en hiver, en attendant le dégel pour creuser la fosse.  Pour le vol de dépouilles, c’était plus accessible et discret que de déterrer un cercueil.

D’où vient cette photographie ? À quelle date remonte la construction de ce monument de pierre ? Qui en est l’auteur ? Les riches archives du presbytère de Chambly possèdent-elles des informations sur cette “chapelle ardente” ?

 

Illustration: Collection de Raymond Ostiguy. Vue du cimetière de la paroisse St-Joseph-de-Chambly vers 1940.  Il faut noter la majesté des grands ormes qui bordent l’allée.

Monument de F. X. Malhiot près du charnier actuel adossé à l’église St-Joseph. Collection Paul-Henri Hudon.