Les Soeurs de Chambly. L’entrée au couvent. Un arrachement familial. Un confinement sublime

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – L’histoire reste à faire de ces filles généreuses qui se dépouillaient de leurs biens personnels, qui disaient adieu à un engagement marital, qui renonçaient au bonheur des berceaux et des biberons. Pour celles-ci, c’était quitter le giron familial pour toujours, ne plus revoir (ou presque) ses proches. Partir et s’emmurer dans le silence pour cohabiter avec des inconnues dans un avenir de mise en commun. La religieuse plonge ainsi d’une destinée particulière à une vie consacrée, impersonnelle. Elle perdra sa personnalité civile. Elle adoptera un nouveau nom et se terrera dans un costume anonyme.

Toute nouvelle professe devra verser à la communauté une dot pour assurer la survie économique du “couvent”. En moyenne cette dot tournait autour de 1600 à 1700 livres, mais le maximum , qui était rarement atteint, était fixé à 3000 livres françaises. (Laperrière, p.47-48).

Bien sûr, l’entrée en “religion” peut passer par diverses étapes: “La première est le postulat, qui peut durer quelques semaines à quelques mois. Au terme du postulat, il y a “prise d’habit” ou vêture. C’est à ce moment que la postulante devient membre de la communauté. Elle est alors novice. Le noviciat dure au moins un an, sous la direction d’une maîtresse des novices. À la fin du noviciat, la religieuse fait profession, prononce ses voeux et devient alors une professe“. L’apprentissage de la vie religieuse étant complétée, la nouvelle “soeur” recevra de sa “mère” supérieure une obédience, une affectation à une “mission”, à un poste, à un travail.  Ce sera dans l’enseignement, dans les soins hospitaliers ou caritatifs ou dans une pratique religieuse contemplative (comme les “Adoratrices”).

Dans toutes les communautés, les “Soeurs” mèneront une vie modeste, réservée. Elles se feront petites, discrètes. On les voit marcher tête baissée, muettes et profil bas, fuyant le regard et la présence de l’autre sexe. Le silence, l’obéissance, la patience cohabitent avec la pauvreté, la fidélité et l’humilité.

Nous connaissons quelques vocations religieuses issues du milieu de Chambly. Ainsi soeur Marie-Élisabeth Dees, fille orpheline de feu John Dees et de Mary Ann Jackson, résidant actuellement à Saint-Joseph de Chambly sur la rivière Richelieusigne un <contrat de profession de foi>. Elle apporte dans sa future communauté un dot de 1800 francs, que lui procure une bienfaitrice, Marie-Joseph Guénet, veuve (Joseph ?) Vocelle de la cité de Québec, laquelle a promis de le faire payer à la communauté”. (Notaire Thomas Barron, 5 avril 1826)

La révérende sœur Sophie Darchesœur de l’Hôtel-Dieu, victime de son dévouement, est morte en soignant les pestiférés en 1847. (Le Monde Illustré, 5 juillet 1884). Elle serait la fille de Noël Darche et de Marie Papineau, baptisée à Chambly le 24 octobre 1821 (Cahiers de la seigneurie de Chambly, no 13, p. 8, publication de la SHSC). Entrées chez les Soeurs de la Charité, surnommées Soeurs Grises, on trouvera Vitaline Larocque, 28 ans, fille de David et de Henriette Daigneau (Recensement de Chambly en 1861). Flavie Demers, 30 ans, fille ainée de Joseph Demers et d’Emmélie Larocque, mariés le 18 février 1828. Elle a été baptisée le 9 décembre 1829. Et Célina Demers, 27 ans, deuxième fille de Joseph Demers et d’Emmélie Larocque. Elle est née le 1er janvier 1831 (Recensement de 1861).

La fille de Joseph Perrault et de Charlotte Gélineau, baptisée à Chambly le 20 janvier 1836, ” Adélaïde Perrault, 26 ans, 3 mois, 6 jours, est décédée. Depuis six ans, elle était entrée chez les Sœurs de la Charité. Atteinte d’une maladie de poitrine. Elle a été inhumée à Chambly. (L’Ordre, vendredi 2 mai 1862).

Le 18 octobre 1855, cinq Soeurs de la Providence, sous la conduite de M. Huberdeau, prêtre, cédant aux instances de Mgr Blanchet, évêque de Vesquelay, quittaient le Québec pour l’Oregon. Parmi elles la Soeur Demers, de Chambly, dite soeur Marie-Angélique. (La Minerve, 18 octobre 1855). Nous avons déjà mentionné dans ces chroniques la vocation particulière de “Mlle Larocque, Soeur de la Providence, fondatrice de l’hôpital de Santiago au Chili. Son tombeau est un lieu de pèlerinage“. (Le Monde Illustré, 5 juillet 1884. Le Montérégien, 28 octobre 2019).

Ressources: Guy Laperrière, Histoire des communautés religieuses au Québec, VLB éditeur, 2013, 329 pages.

Illustration: L’entrée au couvent. L’Opinion Publique, 21 mai 1874.