Les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon coeur d’une langueur monotone. (Verlaine, Poèmes saturniens).

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Qu’arrive-t-il en automne ? Sinon que les feuilles sombres tombent dans la pénombre. Comme l’illustre l’image dépouillée: Des angelots tristes viennent “moucher” les dernières fleurs, celles qui ont résisté aux vents de nordet et qui attendaient une neige tardive.

Mais qu’est-il arrivé à Chambly en automne 1812 ?

En ces années de guerre, le major de Salaberry s’est illustré à Châteauguay. Il donna un coup de pelles victorieux dans les feuilles mortes, le 26 octobre 1813. Par ailleurs, en cette même saison, d’aucuns s’étaient défilés au vent mauvais, et non pas les moindres. Le lieutenant-colonel et commandant le 2e bataillon, le seigneur Melchior Hertel de Rouville, prend sa retraite le 16 octobre 1812 (Montreal Gazette, 5 novembre 1812).

Le lieutenant et quartier-maître René Boileau se retire également en douce. Le docteur Alexandre Talham résigne aussi le 28 septembre 1812, sans faire de bruit. Juste au moment de servir, ils ont résigné leur commission, sans feuille de paye.


Cette curieuse échappée a permis à un inconnu, trente ans plus tard, de se plaindre:  Encore des commissions et des promotions dans la milice, écrit-il.

‘’ Il est malheureux et même honteux de voir que des gens qui ont résigné leur commission dès que la guerre de 1812 a été déclarée, sont aujourd’hui promus à des rangs plus élevés que ceux qu’ils occupaient alors. Ceux qui ont servi pendant toute la guerre sont laissés dans l’oubli malgré les services qu’ils ont rendus volontairement tant dans le Haut que dans le Bas-Canada, même contre l’intention de l’acte de milice pour le Bas-Canada. Pour moi, qui pendant la guerre, reposais ma pauvre tête sur la poignée de mon vieux sabre, pendant que nos nouveaux promus dormaient paisiblement sur le duvet… Videtur si tibi. ‘’(Le Canadien, 12 novembre 1845, page 2).

Si tu vois ce que que je veux dire (Videtur si tibi), la vie est ainsi faite de ces déplorables feuilletons.

On a aussi écrit qu’il y a “du travail à faire à l’hôpital, le 20 novembre 1816”. En effet à cause de la guerre de 1812-1814, cette effeuilleuse, l’armée britannique avait annoncé le ” 7 avril 1813, qu’un hôpital pour deux-cents malades serait établi à Chambly”. Pour autant de feuilles de présence. (Archives de la SHSC. Fort de Chambly, p. 3.10).

“Et je m’en vais au vent mauvais qui m’ emporte
Deçà, delà, pareil à la feuille morte” . (Verlaine encore)

Illustrations: Opinion Publique, 21 octobre 1875; Musée du château Ramezay, 26 octobre 1813