Le coin du vinyle : Le retour du Curieux Ruminant

On ne pourra pas dire dans les livres d’histoire que Ian Anderson se sera pogné le beigne. Voilà quelques semaines, l’as de la flûte traversière nous annonçait une nouvelle offrande de Jethro Tull, la 24e du groupe culte.

Bon. Certains limonent déjà sans même avoir écouter une seule notre de la galette. C’est que primo, l’ami Anderson n’a plus la pêche de ses 20 ans, au niveau des cordes vocales on s’entend. Exit aussi les pièces fleuves de 20 minutes et plus, qui relevaient de l’exploit olympique. Le bonhomme s’est assagi. 77 ans, quand même…

Nous avons donné la chance au coureur et mis la main hier-ô-matin sur le 33 tours vinyle physique chez Archambault. J’avais déjà écouté le teaser moussant la vente du projet et avait été interpellé par le produit qui ressemblait étrangement aux premiers disques du barde anglais.

J’y trouvais une certaine parenté avec “Minstrel in The Gallery”, avec l’usage de la guitare ancienne (il utilise ici une Martin Parlour de 1880), de la flûte bien sûr, du son typique du fuzz de “Sir Lancelot” Martin Barre et le phrasé chanté nasillard d’Anderson.

“Curius Ruminant” est rempli de bonnes intentions. Sans réinventer la roue, le disque est écoutable et séduira certains nostalgiques de Tull. Une fois la barrière de la nouvelle voix plus ténue d’Anderson apprivoisée, il reste des pièces de musique qui sont excellentes. Pas toutes mais plusieurs.

Le jeu de flûte est toujours assuré et on sent bien que les nouveaux musiciens ont écoutés beaucoup de disques de Tull. Le “meaning” est là. Même le guitariste Jack Clark a réussi à mettre la main sur la pédale Boss “Martin Barre”, tant son son s’y rapproche.

La première face du disque est la meilleure et qui punch le plus. On est dans le bon vieux prog des années 1970 avec un full band qui s’amuse. La deuxième est plus soft avec plusieurs titres instrumentaux où la flûte prédomine. Sûrement des pièces issues (ou écartées) du catalogue solo du Vieux Ruminant ?

Critique

Bien sûr, le Tull post années 1970 a son lot de détracteurs. Ils espèrent encore à tort ou a raison, voir émerger des pièces à la “Thick as a Brick”, qui ont fait entrer le groupe dans la légende.

Sorti le 7 mars 2025 “Curious Ruminant” a déjà reçu sa volée de bois vert des pros de la critique. Heureusement que les artistes s’en tapent. Sinon ils ne feraient plus rien. Ian Anderson aura 78 ans au mois d’août. Si la musique peut le tenir assez en vie encore, je ne suis pas contre.

Chez les gentils, l’album obtient une bonne note, certains affirmant que Ruminant est “peut-être le travail le plus satisfaisant de Tull depuis les années 80 qui célèbre des retours aux racines folk du groupe, avec de la mandoline, de l’accordéon et beaucoup de guitare acoustique tout au long des chansons ; plus que ses récents prédécesseurs, Curious Ruminant est leur album le plus organique depuis des années.”

Comme le conclut Anderson dans “Curious Ruminant”, il a atteint le point où il préfère «s’asseoir sur la clôture et profiter de la vue». Ce n’est pas un mauvais conseil de la part de quelqu’un qui en a mérité le droit.

Et avec l’humour caustique qu’on lui connaît, Anderson écrit dans son texte de présentation de l’album qu’il se demande encore s’il s’agit de son chant du cygne ? Ou bien d’une éructation incontrôlée surgissant d’une bénigne indigestion d’une ferveur créative subite ?

C’est l’avenir qui le dira…