Le banc de scie à table basculante. Le banc de scie à chariot roulant

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – C’est l’apparition du moteur à vapeur qui a fait disparaitre les “coupeurs” de bois de chauffage et les scieurs de long. L’énergie quittait alors les muscles du bucheron et s’attelait désormais à un engin mécanique. Petit pas pour l’homme, mais avancée rapide pour l’humanité. Elles étaient nombreuses les variétés de scies circulaires montées sur une structure de bois.

Le marchand Joseph Ostiguy opérait une scierie à Chambly (La Minerve, 5 et 30 septembre 1874, page 2 colonne 7). Il s’était associé en affaires, sous seing privé, avec le maître-charpentier Marcel Tremblay (1853-1874), en 1873, pour la construction d’un moulin à scie mu par la vapeur, érigé en grande partie par les deniers de M. Ostiguy…

Or, Marcel Tremblay décède accidentellement le 5 septembre 1874, frappé à la tête par une pièce de bois qui a rebondi sous la scie circulaire. “Il était à la table de la scie ronde et y engageait un morceau de bois, lorsque tout à coup il est frappé au front et renversé par terre par le bois qui venait d’être lancé en manière de ricochet”. (La Minerve 5 septembre 1874, page 2). Il est décédé peu d’heures plus tard, laissant une veuve et un jeune orphelin qui avait été baptisé le 5 mai 1874.

En septembre dernier (vers le 22 septembre 1874) le moulin est devenu la proie des flammes… Pour marquer l’estime qu’il portait à son défunt mari, M. Ostiguy propose à la veuve Tremblay de reprendre tout ce qui reste des ruines de l’incendie du moulin, chaudière, engin, bielle, fonte et ce qui reste de la bâtisse détruite, ainsi que les dettes dues à la société… (Paul-Solyme Bertrand, l’inventaire de feu Marcel Tremblay et de veuve Sophie-Mélanie Deragon, 19 octobre 1874 et 7 novembre1874; la vente 22 décembre 1874, 12 avril 1875).

Joseph Ostiguy (1831-1893), fils de Pierre Ostiguy et de Marie Brodeur de Sainte-Marie, avait épousé Émilie St-Germain, fille de Louis St-Germain et de Julienne Larocque à St-Joseph, le 3 septembre 1860. Il sera maire de Chambly-Bassin de 1884 à 1889.

L’illustration ci-contre, tirée d’un journal en 1919, nous montre le modèle d’une scie circulaire agrémentée d’un tablier à bascule qui est mu par un manchon (à droite). L’image, incomplète, aurait dû nous montrer à gauche une roue motrice (à engrenage ou à courroie) qui transmet la rotation, provenant d’un engin. À droite, la lourde roue en fonte sert de support au mouvement. On l’appelle roue d’air (roue de force, ou roue d’entrainement). Sa rotation persistante permet, dans son élan, de couper de gros morceaux sans ralentir la scie.

L’image du haut de page, des trois hommes derrière un banc de scie nous fait voir un modèle roulant (ou coulissant) sur un tablier de bois. On distingue à gauche les billes de bois coupées qui attendent d’être fendues pour le chauffage. Sous le “moulin”, un tas de bran de scie. L’engin, bien ancré au sol, comporte, tout comme le banc de scie, une roue de force en fonte. La courroie, presque invisible, relie l’engin à gazoline (vers 1910-1920) à la poulie du moulin.

Dans ces deux cas, c’est le banc qui se déplace. On connaîtra aussi un modèle où la scie à bascule viendra se pencher et tronçonner les billots sur un plateau immobile. Dans ce cas, c’est la scie qui se déplace. Le fonctionnement d’un banc de scie, quel que soit le modèle, nécessitait la présence d’au moins deux, voire trois hommes. Pousser et tenir sous la scie les pièces de bois, Dégager la table. Fournir les billots régulièrement.

Illustrations: Le Canada-Français, 20 février 1919. Archives de la Société d’histoire de la seigneurie de Monnoir, fonds Viens, DSC-0263.