L’aventure audacieuse d’Unibroue dans un livre

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Été 2020, aux Éditions de l’Homme on publie Une maudite belle histoire. Les premières années d’Unibroue, 230 pages. Le mémorial de cette brasserie québécoise, installée à Chambly par le promoteur André Dion, qui connut une expansion internationale.

Le “géant” Robert Charlebois y signe une préface. Pierre Paquin y raconte toutes les péripéties de cette audacieuse aventure. Les partenaires d’affaires, entre autres belges, le choix des étiquettes (Ex: la chasse-galerie), les maîtres-brasseurs, la mise en marché, l’apport de Charlebois, “qui est pour la bière, ce que Depardieu est pour le vin” (Paquin, p. 100), l’exportation hors Québec, les droits d’accise et bien d’autres “irritants” qu’il fallut envisager. Surtout, surtout cette lutte incessante pour s’imposer contre les grands brasseurs historiques.

L’auteur, Pierre Paquin, écrit bien. Sa plume est alerte. Il a du souffle, de l’élan. Ce n’est pas que l’histoire d’une “business”, d’une réussite d’affaires. C’est l’origine de l’industrie brassicole artisanale au Québec, qu’il raconte. Mais surtout cette lutte désespérante pour imposer cette particularité québécoise. Bâtir “la plus importante brasserie artisanale au Québec et parmi les plus importantes en Amérique du Nord.” (Paquin, p. 179).

Ces cuves d’où sort, entre autres, la bière dite “La Maudite” qui reçut le prix de “la meilleure bière au monde“, à Rimini en Italie, lors d’une réunion internationale de centaines de microbrasseurs. (Paquin, p. 218-219). En page 82, on énumère les nombreux premiers prix valorisant la “Blanche de Chambly“, la “Fin du Monde”, la “Gaillarde“, la “Raftman“, et les autres.

Son récit est enthousiaste. “Dans cette histoire unique… vous trouverez en gros format, des joies et des peines, des espoirs et des désillusions, des gestes nobles, des rires, des sanglots. des coïncidences inimaginables, des provocations calculées, de la patience enfin et, … comme personnage central, cette petite brasserie de Chambly, devenue grande grâce à peu de gens et malgré beaucoup d’adversaires.” (Paquin, p. 15-16).

On y lit de juteuses expressions comme: “acheter les portes“(Paquin, p. 201), lorsqu’un producteur s’impose chez un détaillant; “nager dans l’encre rouge“, (Paquin, p. 204), pour désigner une entreprise en difficulté; “le marché des tablettes” (Paquin, p. 189), soit cette guerre pour l’étalage.

Cette “maudite” aventure d’une brasserie québécoise se devait d’être racontée. Pour l’histoire. Pour que le souvenir se garde. Pour que le mérite soit reconnu. Le terme maudit, soyons clair, ne renvoie pas à une damnation, une réprobation, comme le définit Larousse. Non. Ce superlatif dégage ici une couleur bien québécoise, dans le sens d’étonnant, d’important.

Comme disait pépère, surpris par une prouesse: “Ça parle au beau maudit !” On ne s’y attendait pas. On est renversé.  Cette histoire rappelle ces autres luttes de nos ancêtres, celle des bateaux à vapeur de Chambly contre la flotte des Molson dans les années 1820-1840, et celle de l’industriel Victor Hudon, entre 1872 et 1892, avec ses deux filatures montréalaises, à l’encontre des géants du textile.

Tout Chambly et le Québec entier doivent des hommages à André Dion, à Sébastien Dion, son fils, ces bâtisseurs,  qui ont fait voyager la “broue” de chez-nous jusqu’aux confins de l’Europe. Ils “avaient de la broue dans le toupet !”

Cette publication est disponible à la Ferme Guyon, 1001, rue Patrick-Farrar, Chambly

Illustrations: Archives de la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly, Fonds P05. André Dion, PDG de Rona; André Dion et Robert Charlebois, lors du lancement de la “U” au restaurant Fourquet-Fourchette.(Photos d’André Corbeij/Tous droits réservés).