J’ vois rien !

OPINION – J’ai une image dans la tête qui me fait rire, c’est lorsqu’un jeune enfant se met les mains devant les yeux et qu’il croit qu’il est bien caché parce qu’il ne voit rien! Mais c’est plus triste quand on se rend compte que cette notion de «je ne vois pas donc, ça n’existe pas» ne disparait pas, même rendu à l’âge adulte!

C’est exactement ce qui ce produit avec l’environnement. Comme consommateur nous posons des gestes qui ont de graves conséquences sur l’environnement mais comme nous ne les voyons pas ou ne voulons pas les voir, ils n’existent pas. Comme apporter certains changements dans notre vie de tous les jours supposent de faire des efforts, il est bien plus facile d’ignorer les scientifiques, les dénonciateurs, les catastrophes climatiques et de chercher des poux à Greta Thunberg pour la dénigrer plutôt que de saluer son implication.

Le problème de se cacher les yeux à l’âge adulte est le même que lorsqu’on est enfant : c’est que même si on le voit pas, ben ça existe! Depuis des mois, la forêt amazonienne brûle, et pourquoi brûle-t-elle ? Parce que des promoteurs y mettent le feu pour posséder ces terres afin d’y faire pousser des palmiers pour en extraire l’huile de palme, pour faire des pâturages pour y élever du bœuf et des champs pour faire pousser du soya afin de nourrir ces bêtes qui serviront à l’exportation. Quelles sont les conséquences ? Plusieurs espèces d’animaux sont vouées à l’extinction, des peuples qui vivent dans ces forêts sont tués ou chassés de leur village, les cours d’eau sont pollués et un «POUMON» de la terre est en voie de disparaître.

Le Brésil, c’est loin me direz-vous! Ça nous regarde pas, qu’est-ce qu’on peut y faire ? En tant que consommateur nous avons un immense pouvoir. Regarder la liste des ingrédients qui composent l’aliment que nous voulons acheter pour s’assurer qu’il n’y a pas d’huile de palme et cesser ou du moins, diminuer notre consommation de viande. Vous pouvez aussi en parler autour de vous afin de sensibiliser les autres consommateurs. S’il y a une baisse significative de leur vente, les industries vont se réajuster. Il faut créer un mouvement de changement et cessez de dire «kosse ça donne». Comme consommateur, nous avons la force du nombre.

La République-Démocratique-du-Congo (RDC), c’est encore bien plus loin me direz-vous! Dans ce cas-ci, on parle plutôt de minerais tel que le coltan. Qu’est-ce que le coltan ? C’est le minerai si précieux qui sert à la fabrication des cellulaires, ordinateurs portables, tablettes et consoles de jeux pour ne nommer que ceux-ci. De 70 à 80% du coltan de la planète, provient de la RDC.

On estime à plus de 40 000 enfants qui travaillent dans ces mines, et ce dès l’âge de 4 ans car ils sont petits et ils peuvent les faire descendre dans des trous. Ne me dites pas que c’est normal dans ces pays et que de cette façon ils ramènent de l’argent à leur famille. Premièrement, en RDC, il est illégal de faire travailler les enfants, deuxièmement, les enfants meurent de ces conditions de travail et troisièmement, qu’est-ce-qui empêche ces multinationales, qui nagent dans les milliards de profit, d’extraire ces métaux de façon sécuritaire et sans exploiter ces congolais ?

Nous avons tous le sang de ces enfants dans nos appareils. On peut se mettre les mains devant les yeux et ne rien voir ou trouver toutes sortes d’excuses pour continuer notre surconsommation mais ça ne change rien, même si on refuse de le voir, ces enfants, de par notre surconsommation, continuerons de mourir. Est-ce qu’on pourrait regarder un enfant d’ici travailler dans ces conditions ? Sûrement pas! Alors pourquoi ce serait plus acceptable ailleurs ? Est-ce que c’est nécessaire d’avoir toujours le dernier modèle d’appareil ? Est-ce que c’est nécessaire d’avoir autant de ces appareils à la maison ? Ici encore, en tant que consommateur, nous avons le pouvoir d’agir.

On va maintenant revenir chez nous. Nous avons tous un objet dans la maison qui fait disparaître les choses et ça s’appelle une toilette! C’est fou tout ce que les gens peuvent y jeter : restant de nourriture, médicaments périmés, lingettes, tampons, etc. On met ça dans la toilette, on tire la chasse d’eau et pouf, disparu! Personne ne se pose jamais la question, disparu où? Je ne vois plus ce que j’ai «flushé» dans les toilettes donc ça n’existe plus ?

Il faudrait que chaque citoyen se rende à l’usine d’épuration pour voir si c’est réellement disparu. Les médicaments et produits toxiques se retrouvent dans nos cours d’eau et ils ont un impact sur l’environnement. Ramenez vos médicaments à la pharmacie, mettez la nourriture dans le bac brun, les lingettes et tampons dans les vidanges, ce sont des gestes simples mais qui font toute la différence dans la préservation de l’eau potable.

Il est plus que temps de cesser de se mettre la tête dans le sable, de dénigrer ceux qui veulent sauver l’environnement et de passer à l’action. Enlevez vos mains de devant vos yeux, regardez plutôt votre enfant dans les yeux et imaginez son futur parce que vous n’avez pas voulu voir.

Marie-Hélène Gagnon

Saint-Césaire