Paul-Henri Hudon
HISTOIRE – Un atelier local qui a passé dans l’oubli. Une entreprise bien chamblyenne ignorée par ses résidents. Elle a pourtant une longue histoire, soit depuis environ 1849 jusqu’autour de 1900.
Trois entrepreneurs en ferronnerie, à Chambly-Canton, ont opéré successivement cette “business”. Benjamin Draper, Ambroise Kent et Prosper Lemoine. Il s’agit d’une “manufacture de pelles” en fonction sur la rivière Richelieu en bordure des rapides.
Le premier opérateur, Benjamin Draper (1801-1863), époux de Catherine Horsman, a connu cependant une catastrophe le 15 mars 1856. Nous regrettons d’apprendre qu’un incendie s’est déclaré dans la grande bâtisse appartenant à John Yule, écuyer, à Chambly, connue sous le nom de manufacture de coton, dans la matinée du 15 mars 1856. Le feu se communiqua à la fabrique de pelles appartenant à M. Draper et tout fut consumé. La perte de M. Draper se monte à environ 1 000 livres. (Le Courrier de Saint-Hyacinthe 28 mars 1856) (Inventaire de la succession de Benjamin Draper, P. Bertrand, 31 janvier 1867). Ce maître-forgeron et “contractor” habitait à Chambly depuis 1834. Le bâtiment qui avait hébergé la fonderie Draper logeait vraisemblablement dans la première “facterie” de coton (1841-1849) , celle des frères Hatt et de leur beau-frère Richard Mills. Cette ancienne filature donnait adresse sur la rue Richelieu aux numéros actuels 39 à 49.
Un second ferronnier, Prosper Lemoine, qualifié de manufacturier de pelles, relancera l’entreprise. Il fait breveter en 1873 un modèle de pelles. Samuel Thomas Willett baille à Prosper Lemoine, résidant au village du Canton, une boutique connue sous le nom de boutique de Draper, « Draper’s Shop », située au Canton, sur la dam conduisant l’eau à un moulin à farine et tenant à une autre boutique appartenant au bailleur dans laquelle se font les réparations au moulin de ce dernier, joint aussi une chambre dans la boutique… dont il est en possession depuis le premier mai dernier (1872), pour 120 $ de loyer annuel. (J. T. Amédée Robert, 21 septembre 1872). … Il baille de plus une bâtisse en bois au Canton, sur les bords des rapides, sur une dam conduisant l’eau à un moulin à farine, appartenant au bailleur. Cette bâtisse comprend une boutique maintenant occupée par le présent pour la manufacture des pelles de fer, une autre boutique dans laquelle se font actuellement les réparations aux moulins du bailleur, et enfin cette partie de la boutique ci-devant employée comme moulin à scie. Et pour cinq années le droit d’un passage à l’usage des employés et d’autres personnes et d’un pont construit sur la dite dam, pour communiquer de la dite bâtisse à une rue qui passe le long de la dite dam. … Prosper Lemoine avait épousé Mathilde Demers.
Ambroise Kent, qualifié de manufacturier de pelles, continuera la production de pelles. Il engage Joseph et Daniel Tétreault, forgerons, pour un an. Daniel Tétreault sera foreman de la manufacture. Ambroise Kent, shovel manufacturer, avait loué un emplacement à l’endroit où serait la gare ou le dépôt. Il avait baillé de Hugh O’Hara, marchand au Canton, un lot sur l’avenue Bourgogne, borné d’un côté à une rue, d’autre côté à Mme Morissey, avec une maison de briques (Ce lot est au no 2254, Bourgogne, à l’angle de Saint-Georges). Acte signé en présence d’Anthony Cumberworth, ingénieur au Canton, témoin.(Charles-Gédéon Scheffer, 15 avril 1875; 8 mars 1875).
Joseph Gervais, 57 ans, époux d’Emmélie Fortier, est tué accidentellement par la rupture d’une meule d’é… ? à la manufacture de pelles (RSJ, 13 août 1896). Joseph Charrette, employé à la manufacture de pelles, époux d’Hélène Chaloux (RSJ, 5 juillet 1893).
Références : Guy Giguère, Les premières inventions québécoises, Les Éditions Québecor, 1994, pages 98 et 132. Normand Cazelais, Vivre l’hiver au Québec. A. B. McCullough, The Primary Textile Industry in Canada History, Environnement Canada, 1992, 314 pages. Paul-Henri Hudon, La présence anglophone à Chambly, 1780-1880, recherche inédite de 290 pages, disponible à la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly. Journal Le Montérégien, 31 mai 2019.