Paul-Henri Hudon
HISTOIRE – Un croquis, plutôt une esquisse par un auteur non identifié, a rassemblé des personnalités du siècle de Papineau sur une certaine tribune. Dans l’ordre habituel, l’illustration nous présente O’Callaghan, Papineau, John Viger, Dr Nelson et Montfeiraud. “From an Authentic Sketch“.
La scène nous montre le docteur Wolfred Nelson à la tribune, main à la barre, en train de s’adresser à un auditoire. Tous portent le haut de forme et les habits de distinction. Les costumes “d’étoffes du pays” avaient été portés lors d’une réunion du parlement.
Sans qu’on puisse saisir pourquoi ce tel choix de personnages, ni attribuer une circonstance à ce rassemblement, il est évident que cette ébauche coïncide avec les évènements des années tragiques de 1837-1838. Mais lequel ? S’agit-il de l’assemblée des six-comtés, 23 et 24 octobre 1837, que présidait le docteur Wolfred Nelson, où Papineau et Denis-Benjamin Viger ont pris la parole ? L’assemblée de St-Ours, le 7 mai 1837 ? À Montréal ?
O’Callaghan. Nul doute qu’on a peint Edmund Bailey O’Callaghan (1797-1880), député, médecin, journaliste (The Vindicator), patriote, irlandais. À l’assemblée législative, il était le bras droit de Papineau. On ignore s’il se trouvait à l’assemblée des six-comtés. C’est un partisan radical. À l’extrême gauche du tableau, il porte les binocles. Il s’exilera aux États-Unis et ne reviendra jamais au Bas-Canada.
Papineau. C’est notre Louis-Joseph Papineau (1786-1871), la figure marquante de cette période épique. L’homme-peuple, qui s’impose dans tout ce premier demi siècle canadien. L’artiste accentue le regard du tribun, les yeux écarquillés, comme étonnés de ce que Wolfred Nelson expose au public. Lui aussi exilé d’abord aux États-Unis, puis à Paris.
John Viger. Une erreur ! Il n’existe pas de John Viger. Nous pensons qu’on a plutôt esquissé la figure de Denis-Benjamin Viger (1774-1861). L’artiste le montre de profil, semblant s’adresser à Papineau, son cousin. C’est un riche propriétaire foncier de Montréal, prônant une ligne modérée. Capitaine et major de milice, député de Montréal-Est, journaliste prolifique (Le Spectateur, L’Aurore des Canadas), il sera emprisonné à Pied-du-Courant, pendant 19 mois.
Dr Nelson (?). Nous croyons qu’on a dessiné les traits du docteur Wolfred Nelson (1791-1863). À l’assemblée des six-comtés, il prend la parole en premier lieu et il invite l’auditoire à une action radicale. Les armes, puisque la diplomatie ne marche pas ! “Fondre ses cuillères pour en faire des balles“. Sur le tableau, il domine la tribune par des traits plus prononcés. À l’avant-scène reléguant Papineau en une sorte de second rôle.
Montfeiraud. Il s’agit vraisemblablement de Jos Montferrand (1802-1864). Il est présenté à droite du tableau en carrure d’athlète, un peu en retrait. C’est un figure légendaire, “l’homme fort”, qui agit en justicier lorsque une situation lui parait injuste. On connait ses célèbres exploits musculaires dans la région de Bytown en Outaouais, lorsqu’il s’agissait de défendre l’honneur de la “race”. Il a fréquenté les réunions politiques des patriotes. Nous ignorons s’il se trouvait à l’assemblée des six-comtés.
Un sixième personnage à l’extrême droite du tableau, vu de face, est non identifié.
Cette illustration a été présentée à la Société d’Histoire de la seigneurie de Chambly par Mme Jan Johnson, résidente de Chambly, membre de la Société d’histoire. Nous reproduisons cette copie, avec nos sincères remerciements.