Charles-Henri Fleury d’Eschambault, collecteur au canal de Chambly. Un aristocrate parmi les ouvriers

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – On s’étonnera de trouver parmi les travailleurs en “overalls”, ce personnage issu d’une famille aristocrate et bourgeoise, où abondent les professionnels, les médecins, les avocats, les militaires et les entrepreneurs. C’est le fils de Louis-Joseph Fleury-Deschambault (1756-1824), seigneur de Saint-Denis, lieutenant-colonel dans le 109e régiment, et de Gillette Boucher de Montarville

Charles-Henri Fleury d’Eschambault, (1805-1878) a épousé Léocadie Proulx (1827-1888) le 21 août 1838 à Boucherville.  (Le Populaire, 5 septembre 1838). Avocatcollecteur sur le canal (Alexis Mercille, 25 avril 1854), il est embauché à ce poste respectable vers 1854. On le trouve présent à Chambly en avril 1855 (Registre de Saint-Joseph, 18 avril 1855; 23 décembre 1857. Charles-Gédéon Scheffer, 2 juin 1858). Il aurait occupé cette fonction pendant vingt-quatre ans environ. On le désigne aussi surintendant du canal (Charles-Gédéon Scheffer, 22 octobre 1868; 31 octobre 1868). Au recensement de Chambly en 1871, il a 65 ans, Léocadie, 48 ans,  Il était coseigneur de Saint-Denis en 1850 et seigneur unique de 1864 à 1867. Il était aussi membre en 1874 de la Société Saint-Jean-Baptiste de Chambly, présidée alors par Joseph-Octave Dion.

En 1878, son héritier, Arthur Fleury-Deschambault, est propriétaire de l’emplacement familial (lot no 117), ayant 100 pieds de front par 170 pieds de profondeur, entre les terres numéros 116 et 118 (Docteur Taupier) avec une maison en briques, grange, hangars, et, plus le petit lot 116 sans maison, en plus d’une terre à Saint-Joseph d’un arpent de front par quarante de profondeur (no 275), sans bâtisses, et d’une autre terre d’un arpent par 26 de profondeur (no 285) (Notaire N.D.D Bessette, 22 août 1874. Bureau de la Publicité des droits, 9 février 1884).

La résidence des Fleury d’Eschambault appartiendra ensuite au notaire Joseph-Alfred Fournier, à Joseph dit Saint-Louis Lajeunesse (père de la cantatrice Emma Albani), à R. H. Bartholomew, courtier, au Hervey Institute, aux religieuses Filles de la Sagesse, au dentiste Roméo Groulx et enfin au centre commercial Place Chambly. La maison sera détruite par le feu en 1963.

Le journal La Minerve nous apprend que “M. Henry Deschambault de Chambly vient d’être nommé par le gouvernement d’Ottawa, officier des douanes de Sa Majesté. (La Minerve, 12 septembre 1876). Il est décédé à Chambly  le 27 février 1878 et sera inhumé à Saint-Denis-sur-Richelieu. On peut s’interroger sur la fonction de “douanier” à Chambly. Est-ce une sinécure ? Est-ce une promotion politique ?  Alors que le nouveau parti au pouvoir à Ottawa est tenu par les libéraux de Alexander Mackenzie entre 1873 et 1878. Le véritable poste de douane se trouvait au port de Saint-Jean-sur-Richelieu, depuis 1787.Je n’ai pas d’information à ce que des douanes étaient été prélevées sur les marchandises importées ou exportées à Chambly.

Charles-Henri Fleury d’Eschambault  laissait à son décès trois enfants survivants:   Jean-Baptiste-Thomas-Arthur (1848-1887) admis au Barreau en 1875 à Montréal, avocat, célibataire, il sera inhumé à St-Denis. Marie. Elle étudiait chez les Ursulines à Québec en 1866. Alexandre (1861-1910), né à Chambly le 19 septembre 1861. Marié à Québec à Corinne Marcotte (1886-1932) le 14 mai 1883. Médecin, ce dernier s’installera au Manitoba, où il rejoignait son oncle Georges Fleury Deschambault (1803-1870), “riche habitant du Nord-Ouest“, qui décèdera à St-Boniface.

Alexandre aura quatre enfants, deux garçons et deux filles, dont Corinne Fleury d’Eschambault, née à Chambly le 6 août 1886, et Antoine Deschambault (1896-1960) prêtre et “Monseigneur” qui deviendra en 1933 président de la Société historique du Manitoba et, en 1938, président de la Commission des sites et monuments historiques du Canada. Le nom de la rue Deschambault à Saint-Boniface, rendue célèbre par l’auteur Gabrielle Roy et son roman, est redevable à cette famille de l’ancienne aristocratie canadienne et d’appartenance  chamblyenne.

Illustration, La résidence construite pour Charles-Henri Fleury d’Eschambault, sur l’avenue Bourgogne vers 1875. Société d’histoire de la seigneurie de Monnoir, DSC 7466.

Références: Yves Drolet, Notices généalogiques sur la famille Fleury d’Eschambault de la Gorgendière, Montréal 2017. Jean-Jacques Lefebvre, Mémoires, de la SGCF, janvier 1949, vol 3, no 3. Paul-Henri Hudon, Les hommes du canal. Page 150. Étude inédite de 209 pages, parue en 2012.